Dans le contexte actuel de canicules toujours plus nombreuses et plus intenses, la notion de confort thermique dans le bâtiment est plus que jamais d’actualité. En juin, la France a connu des températures 10°C à 15°C au-dessus des normales de saison. Juillet et août ont également apporté leur lot de canicules, et l’été n’est pas fini ! Au-delà des objectifs climatiques nationaux et de réduction de ses impacts, le secteur de la construction doit également relever le défi de conserver la fraîcheur à l’intérieur du bâti, pour l’agrément de ses usagers. Comment mesure-t-on le confort thermique d’été, et quels outils concrets permettent de répondre à ses enjeux en phase de conception des projets ? Suivez le guide…

Le confort thermique dans le bâtiment : une notion subjective qui a beaucoup évolué avec le temps

Les vagues de chaleur en Europe ces dernières années sont devenues beaucoup plus probables et intenses en raison du changement climatique. 43 vagues de chaleur ont été recensées en France depuis 1947. Or, nous avons connu autant de vagues de chaleurs de 2005 à 2020 (en 15 ans) qu’entre 1960 et 2005 (en 45 ans), avec 4 épisodes avant 1960 et 26 épisodes depuis 2000. La fréquence de ces événements devrait doubler d’ici à 2050. L’été 2022 ne vient pas démentir cette tendance que tout le monde peut désormais toucher du doigt.

Qu’est-ce que le confort thermique, et quels facteurs l’influencent ? 

Le confort thermique se définit par la satisfaction vis-à-vis de l’ambiance thermique qu’une personne bien portante et en bonne santé ressent dans un bâtiment après une certaine période d’adaptation.  Cette notion peut être quantifiée. Elle comporte des éléments subjectifs qu’une approche expérimentale et statistique a permis de préciser.

Les facteurs ayant une influence sur le confort thermique sont :

  • Le niveau de production d’énergie par le métabolisme qui dépend de l’activité de la personne ;
  • La vêture, ou résistance thermique des vêtements ;
  • La température sèche de l’air ambiant ;
  • Les échanges radiatifs avec l’environnement ;
  • La vitesse de l’air ;
  • Le degré d’humidité de l’air ambiant.
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Températures de confort pour différentes activités ©Thermal Comfort, P.O Fanger 


Quelques jalons historiques pour comprendre le confort thermique

Les normes internationales de confort thermique s’appuient sur les travaux du danois Povl Ole Fanger (décédé en 2006). Son ouvrage clé, « Thermal Comfort », a été publié en 1970. P. O. Fanger a fait passer un millier d’étudiants dans des chambres climatiques, en contrôlant divers paramètres : la température d’air, de surface, la vitesse d’air, la vêture et l’activité. A l’issue de cette expérience, leurs sensations ont été recueillies sur une échelle de notation allant de -3 « cold » à +3 « hot ». « 0 » correspondait au confort thermique. La sensation thermique « moyenne » pour une ambiance donnée s’appelle le Predicted Mean Vote (PMV, « vote moyen prédit »).

Conscient que le PMV, même à 0, peut générer une sensation d’inconfort pour certains individus, Fanger a établi le Predicted Percentage of Dissatisfied (PPD, « pourcentage de personnes non satisfaites » dans une ambiance thermique donnée). Les statistiques révèlent que ce pourcentage ne peut pas descendre en dessous de 5%, même en ajustant au mieux l’ambiance thermique : il y aura toujours au moins 5% de personnes non satisfaites, quelle que soit l’ambiance thermique.

Les travaux de Fanger sont à l’origine de diverses normes internationales de confort :  norme Ashrae 55 (dernière révision en 2017), norme ISO 7730 (dernière révision en 2005) et norme EN 15251 (dernière révision en 2015).

Ces normes nous disent beaucoup de choses sur le confort d’été et le rôle de l’usager. Par exemple, porter une chemise à manches courtes dans un bureau l’été plutôt qu’une chemise à manches longues permet de supporter une température intérieure plus élevée de 0,4°C à confort égal. Un ventilateur plafonnier permet, à confort égal, de supporter une température intérieure plus élevée de 2°C. Dans de nombreux cas, cela permettra d’éviter de mettre la climatisation en route.

Au début des années 2000, des travaux de l’ASHRAE ont montré que le modèle de Fanger n’était pas valable pour les bâtiments non climatisés et ventilés naturellement. Ceux-ci stipulent que, dans les bâtiments ventilés naturellement, la température extérieure plus élevée en été prédispose les individus à une faculté d’adaptation accrue, permettant ainsi d’éviter le recours à la climatisation. Plus la température extérieure moyenne augmente et mieux on supporte des températures intérieures élevées : on appelle cela le confort adaptatif, et il existe des normes internationales pour le qualifier (telle que ASHRAE-55 révisé en 2010). Au-delà d’une température intérieure de 32°C toutefois, il y a des risques réels pour la vigilance et la santé, selon l’OMS.

Dès lors, comment favoriser le confort thermique dans un bâtiment, et plus particulièrement lors d’épisodes caniculaires ?

Le bioclimatisme, encore et toujours : la « checklist » incontournable

La conception bioclimatique permet de concevoir un bâtiment en fonction du climat afin d’en réduire les besoins énergétiques et d’éclairage. Cette démarche vise également à améliorer le confort thermique du bâtiment et à éviter de recourir à la climatisation en été, ou du moins à en limiter nettement la consommation énergétique. En tant que bureau d’études environnement résolument pionnier du bioclimatisme, TERAO dispose d’une Cellule d’expertise transverse de Conception et Modélisation Bioclimatique (CMCB).

Voici par exemple une liste d’éléments à considérer dans tout projet bioclimatique tendant vers un meilleur confort des usagers.

L’emplacement 

L’emplacement a beaucoup d’importance, notamment vis-à-vis de la circulation des vents. En hiver, il est nécessaire d’assurer la protection du bâtiment contre les vents froids mais en été, au contraire, il faut encourager la ventilation naturelle. Heureusement, les vents dominants d’été ont rarement la même direction que les vents dominants d’hiver et on peut se protéger des vents froids tout en étant plus ouvert aux vents d’été. Il faudra également disposer le bâtiment à proximité de zones végétalisées pour disposer d’un ombrage bénéfique en été. Par effet d’évapotranspiration, la végétation permet aussi d’abaisser légèrement la température au voisinage du bâtiment.

L’orientation du bâti

La course du soleil s’étudie en fonction de la latitude du lieu où le bâtiment est implanté. Une bonne orientation permet de bénéficier d’apports solaires utiles en hiver et de s’en protéger facilement l’été. Placer les surfaces vitrées à l’Ouest est une mauvaise idée : les apports solaires transmis sont alors maximaux en fin d’après-midi quand le pic de température extérieure est le plus élevé, ce qui entraîne des surchauffes. Les vitrages horizontaux ou peu inclinés, qui transmettent beaucoup plus d’apports solaires en été qu’en hiver, sont également à éviter.

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Réhabilitation lourde de la Tour Ibox, Paris 12ème ©TERAO | DTACC Architectes et DATA Architectes


La disposition des pièces

Elle fait le fruit d’une réflexion à part entière et fréquemment sous-estimée. Pourtant, en fonction de l’orientation du bâti, des usages et de l’occupation, les pièces ne seront pas disposées de la même manière. Les zones de circulation, par exemple, ne requièrent pas des conditions de confort très strictes. Elles peuvent être non ou très peu chauffées en hiver et servir d’espaces tampons, ou être disposées dans des endroits où les apports solaires en été sont difficiles à occulter. On admettra plus facilement un inconfort passager dans une circulation que dans un bureau. Les pièces nécessitant beaucoup de lumière naturelle pour un travail particulier devraient être disposées au nord, mais attention : même un vitrage vertical nord sous nos latitudes transmet des apports solaires aussi bien en demi-saison qu’en été, en début de matinée comme en soirée.

L’optimisation de l’enveloppe

Isolation thermique, compacité et taux de vitrage seront optimisés pour minimiser les besoins de chaud et de froid tout en assurant un éclairage naturel suffisant. Dans le tertiaire, il est inutile d’aller au-delà d’un taux de vitrage en façade autour de 40%. L’excédent de vitrage conduit à des surchauffes en été sans apporter nécessairement de lumière utile. Il est inutile, par exemple, de vitrer les parties de façade situées en dessous du plan de travail.

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© Franklin Azzi Architecture


Les protections solaires et la gestion des occultations

Les vitrages ont fait d’énormes progrès ces dernières décennies. On sait désormais fabriquer des vitrages à couche sélective qui sont à la fois isolants, bons transmetteurs de lumière et bons réducteurs d’apports solaires totaux. Associer un vitrage à faible facteur solaire (0,36 par exemple), bon facteur de transmission lumineuse (0,69 par exemple) à des stores intérieurs mobiles très réfléchissants suffit dans la plupart des cas à assurer un niveau de confort acceptable en été sans aller chercher des solutions complexes de brise-soleil extérieurs motorisés.

L’inertie thermique intérieure

Celle-ci joue un rôle crucial dans le confort thermique. Une bonne inertie thermique intérieure permet d’emmagasiner la fraîcheur apportée la nuit durant, laquelle permettra ensuite pendant la journée de rafraîchir passivement l’intérieur du bâtiment. Le matériau constituant cette inertie devra à la fois disposer d’une bonne capacité thermique volumique et d’une bonne conductivité thermique. Une dalle de plancher en ciment, d’au moins 7 cm d’épaisseur, ou une dalle lourde en plafond conviendront tout à fait. Des simulations thermiques précises montrent que l’association d’une telle dalle et de dispositifs de ventilation naturelle correctement dimensionnés permettent de diminuer de plus de la moitié les besoins de climatisation ainsi que la puissance des installations de climatisation. Grâce à des ventilateurs plafonniers, ces dispositifs permettent même de se passer de climatisation dans les bureaux pour peu qu’on soit moins exigeant sur les températures de consigne.

Ventilation naturelle et confort d’été

Nous en parlions plus haut, la ventilation naturelle est un facteur clé de confort. Lors de périodes caniculaires, celle-ci n’a pas besoin d’être traversante, pour la simple et bonne raison que le vent est le plus souvent absent. C’est sur le tirage thermique qu’il faut compter. Il convient alors de disposer dans la pièce des ouvrants dédiés de ventilation naturelle, munis de ventelles assurant la sécurité anti-intrusion et la protection contre la pluie. Ces ouvrants seront plus hauts que larges. Bien dimensionnés, ils permettent des taux de renouvellement d’air supérieurs à 10 volumes/heure.

L’aménagement extérieur

Il peut y avoir plus de 5 degrés d’écart de température d’air entre une zone boisée et une zone minérale en ville : gare alors à l’Ilot de Chaleur Urbain ! La végétation joue un rôle crucial dans les aménagements extérieurs pour améliorer le confort, aussi bien en milieu extérieur que dans les bâtiments. Un sol poreux permettant les infiltrations d’eaux pluviales, une biodiversité encouragée, couplés à une démarche globale de création de microclimats confortables en été ne sont plus des options dans le contexte actuel de réchauffement climatique.

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Quartier Issy Coeur de ville, projet emblématique de TERAO ©Valode et Pistre


En raison des facteurs variés dont dépend le confort thermique dans le bâtiment, ainsi que de l’occupation diurne et nocturne d’un bâtiment donné, les équipes de TERAO s’attachent à effectuer une analyse bioclimatique fine de chaque projet, ainsi qu’une Simulation Thermique Dynamique contextualisée. La prise en compte de ces facteurs par le recours à une ingénierie experte est désormais une absolue nécessité, pour limiter les contributions supplémentaires au réchauffement climatique dont nous sentons tous désormais les effets. Construire des bâtiments résilients face au changement climatique et confortables en toute saison, c’est plus qu’une science, c’est un art !

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Fondateur -
Polytechnicien (X74) et diplômé de l'Université de Stanford (USA) spécialiste énergie solaire. Expert de rang international en thermique du bâtiment.

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